
LE COMMUN
DES COMMUNS AUX ENCLOSURES
L’histoire des communs remonte aux origines de l’humanité : ils désignent une gestion collective de ressources communes. Un point de bascule important a lieu en Angleterre au XVIIe siècle, où les communs ont disparu au profit d’une gestion captatrice de la propriété.
Au Moyen Âge, en effet, les terres, qu’on appelait les communaux, pouvaient être ouvertes aux récoltes de tous : n’importe qui pouvait aller ramasser du bois de chauffage et des champignons, les paysans pouvaient y laisser paître leurs moutons, etc. Le mouvement des enclosures, qui consistait pour les propriétaires fonciers à fermer l’accès aux terres, va peu à peu provoquer la fin de ces communs et jeter dans la misère une grande partie de la population rurale. […]
UNE COMMUNAUTÉ AU SERVICE DE L’INTÉRÊT GÉNÉRAL
La notion de communs resurgit en 1968, à l’occasion de la publication du sociobiologiste Garett Hardin, dans un article intitulé « La tragédie des communs ». Considérant à partir d’un schéma abstrait (notamment à partir d’une théorie des jeux) des pâturages communs où des bergers cherchent à nourrir individuellement le plus grand nombre d’animaux, réduisant ainsi considérablement la quantité d’herbes disponible, il concluait que le libre usage des communs conduit à la ruine de tous.
Le mérite d’Elinor Ostrom, prix Nobel d’économie (2009), est d’avoir montré dans ses recherches que cette conception des communs reposait sur une vision abstraite ayant peu à voir avec les communs réels. Les communs sont liés à des communautés, et donc à des valeurs et à des règles collectives, grâce auxquelles les individus communiquent et négocient dans une perspective qui ne se réduit pas à leurs intérêts immédiats.
Le principe de commun a une teneur essentiellement politique dans la mesure où il suppose la capacité naturelle des individus à délibérer et décider collectivement de ce qui est juste.
C’est la participation à l’activité commune qui fonde l’obligation. Les choses sont rendues communes par cette activité (rien n’est commun en soi). Le commun est une institution vouée à perdurer par l’élaboration continue de règles et de pratiques, prenant en charge les conflits et les décisions en vertu d’un principe d’autogouvernement.
UNE RESSOURCE PARTAGÉE
À la suite des travaux de Elinor Ostrom, les communs peuvent ainsi se définir par la combinaison de trois facteurs :
- une ressource en accès partagé (ou une incomplétude à combler ou une solution collective à trouver à un problème) ;
- un système de droits et d’obligations (un faisceau de droits) pour l’accès à la ressource ;
- des règles de contrôle et de gestion des conflits (un système de gouvernance) pour gérer les ressources quand elles sont jugées importantes mais fragilisées, menacées, ou peu développées et lorsqu’on considère que, pour en préserver l’accès, une gestion en communs est plus efficace que des solutions par le marché ou la gestion publique.
RÉHABILITER LES COMMUNS AUBAISIENS
À Aubais, la « communauté des habitants » pratiquait les communs dès le Moyen-Âge, époque à laquelle des terres, le moulin à huile ou encore le four à pain étaient gérés collectivement. Elle organisait également des travaux d’intérêt général, par exemple pour se protéger de certains périls comme la peste, contre laquelle de hauts murs en pierres sèches avaient été construits autour du village, lors de ce qu’on pourrait aujourd’hui appeler des « chantiers participatifs ».
— Source : La vie de la communauté d’Aubais sous l’ancien régime, François Lavergne, 2025.
Aujourd’hui, la forêt est une ressource qui bénéficie à toutes et tous, dont les bienfaits profitent à l’ensemble des habitants d’Aubais et au-delà, qu’ils soient propriétaires fonciers ou non.
Cette ressource partagée est également mis en péril par la hausse du risque d’incendie et c’est parce que nous en sommes collectivement responsables — propriétaires et usagers — que le projet « Contre les incendies : la forêt d’Aubais en commun » souhaite penser sa gestion et sa préservation collectivement, en réhabilitant la notion de « commun », comme cela se fait déjà ailleurs.
Pour ce faire, le projet est accompagné par La Coop des communs, une association nationale dédiée aux « communs » qui réunit à la fois des chercheurs et des acteurs de terrain.
— Source (trois premières parties) : La Coop des Communs.
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